Venue du Japon, la technique des coûts cibles (target costing, en anglais) consiste à définir un objectif de prix de revient pour un produit à lancer sur un marché déterminé. Il s’agit de fixer le coût des différentes fonctions du produit et de ses composants à partir de leur contribution à la valeur totale du produit. Contrairement à la comptabilité traditionnelle, qui privilégie le contrôle des coûts aux stades de la fabrication et de la distribution, la méthode des coûts cibles situe les efforts de ciblage en amont, c’est-à-dire dès la conception. Car c’est à cette étape que 80% du prix de revient final d’un produit est déterminé. L’utilisation des coûts cibles permet ainsi de faire coïncider en permanence les choix de conception, les coûts de fabrication et la valeur accordée par le consommateur aux diverses fonctions du produit.
La méthodologie comprend quatre étapes. C’est d’abord la constitution, autour du bureau d’études, d’une task force rassemblant des représentants des services fabrication, marketing, achats, ventes, qualité et contrôle de gestion. Cette équipe va établir la liste des fonctions mécaniques (celles qui sont directement liées aux performances techniques du produit) et des fonctions de confort (liées aux demandes plus subjectives des utilisateurs potentiels). Un sondage réalisé auprès d’utilisateurs cibles permet ensuite de déterminer l’importance qu’ils accordent à chacune des fonctions. Lesquelles se voient ainsi attribuer un coût cible, sous la forme d’un pourcentage du coût total du produit. L’étape suivante consiste à définir le poids de chaque composant dans les différentes fonctions du produit.
Le bureau d’études (qui connaît la contribution de chaque composant à la satisfaction de ces fonctions) effectue un calcul croisé pour établir le coût cible de chaque composant à partir du coût cible des fonctions dans lesquelles il intervient, et de son niveau de contribution à chacune d’entre elles.
Une estimation des coûts de fabrication est ensuite effectuée. Le prototype retenu sera celui qui réalisera le mieux la performance voulue à l’intérieur d’une fourchette appelée «zone de valeur optimale» (ZVO). Chaque composant doit être situé dans cette ZVO, c’est-à-dire n’être ni trop cher ni trop bon marché par rapport au coût cible calculé. S’il se révèle trop bon marché, des investissements supplémentaires peuvent être éventuellement engagés afin qu’il remplisse mieux ses fonctions et que la pérennité du produit soit assurée.
La méthode des coûts cibles présente plusieurs avantages. Elle fournit en permanence aux concepteurs des informations sur les coûts prévisionnels induits par leurs choix techniques. Les surcoûts et les dérapages sont ainsi évités. Elle permet également d’orienter les équipes de développement vers le même objectif qui est d’optimiser la valeur d’un nouveau produit et de minimiser son coût de lancement. En concentrant la réflexion sur les coûts au niveau de la conception, elle réduit les modifications aux stades de fabrication et de commercialisation. Très utilisée au Japon, la méthode des coûts cibles reste encore marginale au Maroc. Elle est pourtant susceptible d’intéresser toutes les entreprises intervenant sur des marchés concurrentiels avec des produits à durée de vie courte.
Mohamed LAHYANI
Expert-comptable & Commissaire aux comptes diplômé d’Etat à Paris.
Membre de l’Ordre des Experts-comptables au Maroc et en France.
Fondateur du cabinet Audit & Analyse Tanger www.audit-analyse.com
Président de la commission Etudes Fiscales & Juridiques du Conseil Régional de l’Ordre des
Experts-comptables de Tanger Tétouan Al-Hoceima.
Auteur de nombreux ouvrages en:
fiscalité, audit, finance, comptabilité, évaluation des sociétés, consolidation, contrôle de gestion…