La réponse de l’ex-président du conseil National de l’ordre des architectes du Maroc représente plus qu’une proposition, c’est une vraie stratégie de défense mesurée et efficace, qui réunit les architectes autour d’une cause commune, vitale pour l’avenir de la profession et de nos espaces de vie bâtis.
Sans le système de quotas (limiter le nombre de projets par architecte par mois ), et en l’absence d’un barème minimum des honoraires pour les prestations privées de l’architecte ( rappelons que le barème minimum existe pour les projets de l’état), il deviendrait quasiment impossible de faire face à la concurrence déloyale exercée par certains architectes dits « signataires », qui cassent les prix pour engranger un maximum de projets. Les signataires, expression qui émane du jargon de la pratique du métier , et qui est employée au sens litéral, puisqu’ils signent et entament la procédure d’autorisation de construire de plusieurs dizaines de projets par mois sans pour autant en assurer la mission complète du suivi de chantier telle que édictée par la loi 16-89, et souvent sans être l’auteur des plans, dessinés par d’autres. Ils deviennent donc avec ce procédé de la signature de complaisance l’une des principales causes de la laideur urbaine environnante et de la prolifération de quartiers dits « d’habitat marocain », qui n’ont rien de marocain d’ailleurs. Des quartiers entiers de « béton-villes » laids,où on sent un vrai malaise urbain, et qui en grande partie se donnent à l’autoconstruction avec tout ce que cela peut entraîner comme infractions et risques de construction. Aucune qualité architecturale, et aucune sécurité dans le bâtiment en général.
La liberté des prix et de la concurrence à laquelle nous confronte la loi 104-06, créent aujourd’hui un vrai dilemme, avec la réalité de la pratique du métier d’architecte dans le Maroc actuel !
Alors que faire ? Laisser les coudées franches à ces signataires qui cassent les prix et par là toute une profession sous couvert de la liberté des prix, ou alors réguler et trouver un meilleur compromis qui tienne compte des réalités du terrain ?
En engageant des pourparlers sereins avec le conseil de la concurrence et en activant les dispositions des articles 3 et 4 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, qui permettent de réglementer sous certaines conditions les prix, les architectes pourraient enfin exercer dans un véritable cadre concurrentiel qui profite au citoyen et à notre cadre de vie.
Soukayna BENJELLOUN
Docteur en gouvernance territoriale et politiques publiques