“Nous voulons que ce projet aboutisse parce que Tanger mérite des options éducatives de qualité pour son développement et sa prospérité”

Il avait un beau rêve et il l’a concrétisé. Mais ce joli projet s’est transformé en un vrai cauchemar. Voici l’histoire de l’école Alhambra telle que racontée par son fondateur, Rafael González. Entretien

Comment est née l’idée de construire l’École Alhambra?

Notre famille vit au Maroc depuis plus de trois générations et nous avons constaté la forte demande pour un système éducatif de qualité centré sur l’apprentissage des langues, mais qui favorise également un fort sentiment d’appartenance au Maroc, en respectant ses traditions et ses valeurs. Nous voulions offrir une alternative qui éviterait aux étudiants d’émigrer pour atteindre leurs objectifs, tout en développant une conscience globale et une vision ouverte du monde dans lequel nous vivons.

Comment le projet a-t-il évolué et quel a été le montant de l’investissement?

En 2022, l’archevêché nous a proposé de louer un de ses terrains pour ce projet, et nous avons accepté sans hésitation. Nous avons commencé la construction en octobre 2023. Nous avons fait tout notre possible pour terminer les travaux en moins de six mois, et c’est ce que nous avons fait. Le 15 avril, l’école était complètement achevée, décorée et meublée. La réalisation de l’École Alhambra a représenté un investissement de plus de 15 millions de dirhams et deux années de travail acharné.

Que s’est-il passé ensuite?

Une fois le projet terminé et alors que nous étions en attente des permis d’exploitation, l’archevêché de Tanger a changé d’avis et a bloqué l’émission des autorisations nécessaires. Ce fut un coup inattendu et dévastateur.

Quelle était la position initiale de l’archevêché et comment a-t-elle évolué au fil du processus?

L’archevêché a soutenu le projet dès le début et a établi des conditions que nous avons acceptées sans problème. Ils nous ont appuyés auprès des autorités pour accélérer les démarches. L’archevêque de Tanger a même écrit au Wali à plusieurs reprises pour demander sa collaboration afin de terminer le projet à temps, et c’est ce qui s’est passé : toutes les administrations, tant locales que régionales, ont été très favorables. Cependant, lorsque la construction a été terminée, l’archevêque a commencé à remettre en question la validité du contrat. Un jour, ils nous ont convoqués à une réunion et, sans préavis, ils nous ont présenté deux options drastiques : démolir le bâtiment ou le leur vendre à un prix symbolique. C’était un retournement radical et inattendu.

Ce projet était un pari important pour Tanger. Quel impact espériez-vous qu’il ait sur la ville?

L’école allait offrir une alternative éducative unique à un moment de forte croissance pour Tanger, combinant l’arabe, le français et l’espagnol. Nous voulions offrir aux familles une option éducative de qualité sans avoir besoin de quitter le pays ou de se tourner vers les écoles internationales, ce qui est crucial dans une ville en pleine expansion. En outre, le projet allait créer de nombreux emplois, faciliter le retour de nombreux Marocains résidant à l’étranger (MRE) qui, jusqu’à présent, n’avaient pas d’alternatives éducatives pour leurs enfants.

Quel a été l’impact sur les familles qui avaient déjà inscrit leurs enfants à l’école et sur les emplois créés?

Dévastateur. Le 1er juillet, après avoir épuisé toutes les options de négociation avec l’archevêché, nous avons dû appeler plus de 150 familles pour leur annoncer que nous n’ouvririons pas en septembre. De plus, nous avions créé plusieurs emplois parmi le personnel enseignant et administratif. Du jour au lendemain, ces personnes se sont retrouvées sans emploi. Nous avons essayé de les reclasser dans d’autres établissements et nous avons maintenu les salaires de ceux qui n’ont pas encore trouvé d’alternative. Ce fut la pire semaine de ma vie, voir s’effondrer des années de travail acharné et les attentes de tant de personnes. Cela a également été un coup dur pour la ville, qui perd une offre éducative cruciale, surtout à un moment où Tanger a besoin d’alternatives éducatives pour soutenir sa croissance.

Quelles actions légales prenez-vous pour défendre votre projet?

Nous avons porté plainte contre l’archevêque pour escroquerie, extorsion et non-respect du contrat devant les tribunaux. Nous n’avions jamais imaginé que nous en arriverions à ce point. Nous espérons que justice sera faite et que nous pourrons ouvrir l’école le plus tôt possible. Nous ne luttons pas seulement pour notre projet, mais aussi pour l’éducation et l’avenir des enfants à Tanger, ainsi que pour les emplois et la stabilité que nous avons générés dans la communauté. Nous voulons que ce projet aboutisse parce que Tanger mérite des options éducatives de qualité pour son développement et sa prospérité.