Le tourisme s’est imposé comme l’un des moteurs économiques les plus influents à l’échelle mondiale, non seulement par son poids dans le PIB et l’emploi, mais aussi par sa capacité de transformation sociale et territoriale. Le Maroc, riche de son patrimoine culturel, historique et naturel, se trouve aujourd’hui dans une position stratégique pour repenser son modèle touristique. La transition vers un tourisme circulaire, aligné sur les principes de l’économie circulaire, constitue une opportunité unique pour placer la durabilité au cœur de son développement dans les dix prochaines années.
Par sa transversalité, le tourisme est lié à de multiples secteurs : énergie, transport, gestion de l’eau, traitement des déchets, restauration et construction. Ainsi, adopter un modèle circulaire n’est pas seulement une nécessité environnementale, mais également une stratégie de compétitivité et de résilience, impliquant l’ensemble des acteurs du territoire, des pouvoirs publics aux communautés locales, en passant par les voyageurs eux-mêmes.
Diagnostic actuel du tourisme et de ses impacts
Le modèle touristique linéaire dominant a généré d’importantes externalités négatives que le Maroc doit prendre en compte :
•Émissions de gaz à effet de serre (GES): le tourisme représente 8% des émissions mondiales, dont 75% proviennent du transport, 21% de l’hébergement et 4% des activités.
•Consommation énergétique: si la tendance actuelle se poursuit, la consommation d’énergie dans le secteur touristique pourrait augmenter de 154 % d’ici 2050.
•Production de déchets: le tourisme génère une quantité importante de plastiques à usage unique et de déchets alimentaires. Les hébergements concentrent 60 % de ces déchets solides et la restauration 40%.
•Pression sur l’eau: un touriste consomme entre 450 et 800 litres d’eau par jour, contre environ 125 litres pour un résident, ce qui accentue la pression dans les zones littorales et arides.
•Dégradation environnementale et sociale: perte de biodiversité, pollution, surexploitation des ressources et inégalités dans la répartition des bénéfices mettent en péril le capital naturel et social du pays.
Impacts spécifiques au Maroc
Avec sa double façade méditerranéenne et atlantique, le Maroc fait face à des défis spécifiques:
•Vulnérabilité de ses écosystèmes côtiers et marins.
•Pression croissante sur ses ressources hydriques, notamment dans les régions arides ou semi-désertiques.
•Risques de saturation dans des destinations phares comme Marrakech, Fès ou Chefchaouen.
•sNécessité d’équilibrer l’accueil massif des touristes avec la préservation des communautés locales et de leurs traditions.
Les avantages de la circularité pour le Maroc
La mise en place d’un modèle de tourisme circulaire offrirait plusieurs bénéfices au Maroc:
•Optimisation des ressources et réduction des coûts : moins de consommation énergétique, hydrique et matérielle.
•Renforcement de la compétitivité: les destinations durables sont de plus en plus attractives pour les voyageurs responsables.
•Résilience climatique: meilleure anticipation face à la raréfaction de l’eau, aux vagues de chaleur ou à l’érosion des plages.
•Valeur ajoutée au territoire: positionnement du Maroc comme référence méditerranéenne et africaine en matière de durabilité.
•Retombées sociales positives: intégration des communautés locales, meilleure redistribution des richesses et création d’emplois verts.
Axes stratégiques pour la prochaine décennie (2025-2035)
Pour ancrer le tourisme circulaire comme pilier de développement, le Maroc devrait structurer sa stratégie autour de cinq axes:
1.Un leadership engagé: un rôle fort des autorités publiques pour tracer une feuille de route claire avec des objectifs mesurables (réduction des émissions, gestion de l’eau et des déchets).
2.Une stratégie nationale intégrée: aligner investissements, réglementation et promotion internationale autour de la circularité.
3.Un écosystème collaboratif: stimuler les partenariats entre secteurs public et privé, communautés locales et acteurs éducatifs pour sensibiliser et former.
4.Innovation et technologie: investir dans les énergies renouvelables, la mobilité durable, la digitalisation verte et l’économie collaborative.
5.Expériences touristiques circulaires: hôtels éco-efficients, réduction des plastiques, restauration locale et de saison, mobilité électrique, activités culturelles à faible impact.
Le Maroc se trouve à un tournant décisif. Le tourisme circulaire ne doit pas être perçu comme une mode passagère, mais comme une stratégie de long terme. Son adoption peut transformer le pays en référence régionale en matière de durabilité, tout en renforçant sa compétitivité internationale.
En réduisant ses vulnérabilités climatiques, en valorisant son patrimoine naturel et culturel et en garantissant un développement plus équitable, le Maroc a l’opportunité de faire du tourisme circulaire un levier majeur de prospérité durable pour la décennie à venir.

























