Les habitants de cette belle ville (entièrement marginalisée) et sa société civile, réclament des autorités communales, qui vont bientôt lancer un projet de réaménagement du Balcon Atlantico, de respecter une conception paysagère qui le protège comme lieu de mémoire collective et patrimoine historique. Ce que tout le monde craint c’est de voir la commune manœuvrer pour effacer l’identité de Larache en imposant des projets étranges et sans aucune valeur.
Ce texte, publié par l’architecte larachois Anas El Himdi sur les réseaux sociaux, décrit parfaitement la situation actuelle et l’angoisse des habitants de Larache de perdre définitivement une partie de l’histoire de leur ville. Il s’agit effectivement d’une riche histoire dont plusieurs éléments risquent malheureusement de disparaître.
“La plupart des habitants de Larache le savent, il y a quelque chose de magique dans ce lieu si particulier, que personne n’a jamais pu oublier jusqu’à ce jour.
Pendant les week-ends, le Balcon était l’endroit préféré pour se promener. Face à la mer, la vue était spectaculaire. Une longue et blanche balustrade en béton, de style bien bornée en moulures rectangulaires simples et sobres, suspendue au bord de la falaise, offrait une vue imprenable sur l’océan Atlantique en contrebas, avec de grosses roches noires constamment balayées par les vagues puissantes et énormes.
Que ce soit en hiver ou en été, le Balcon était et restera la promenade incontournable pour les habitants de Larache, aujourd’hui avec les pergolas composés de fins poteaux en béton et des lames en bois qui nous orientent en chemin vers cette tonnelle centrale qui ne manquait d’événements heureux à l’époque.
Partant de la musique de Ala jusqu’au podium des jeunes artistes de rues en Rap et en d’autres styles musicaux. L’orchestre de la ville y jouait tous les dimanches, à condition qu’il fasse beau, pour nous enchanter de sa musique.
Décrire le coucher de soleil, c’est comme décrire un poème. Par temps clair, à n’importe quelle saison de l’année, nous nous appuyions sur cette rambarde en béton pour voir lentement et avec délectation la mer “manger” le soleil. La splendeur des couleurs du coucher de soleil inondait nos yeux, laissant un souvenir indélébile dans notre esprit. Les trottoirs étaient larges, comme tous ceux de Larache, décorés de massifs de fleurs rouges, jaunes et blanches émergeant du vert des feuilles qui les entouraient.
Si aujourd’hui je me permets de décrire les souvenirs que j’ai de cet endroit, c’est pour pouvoir en garder une trace, ne serait-ce que sur un de mes réseaux sociaux, avant de démolir tous ces moments agréables passés ici, par ce nouvel aménagement et palmerisation de cette allée…
Le projet publié et découvert sur les réseaux sociaux reflète à vrai dire un effort fourni et un temps investi à reconnaître, mais illustre également à travers ses images de synthèse et de l’animation présentée l’absence de prise de conscience de ce lieu de mémoire collective, de son histoire, de ce contexte spatial, ce que réclament et ce que les Larachois aimeraient y avoir sur ce Balcon, nous apprenons vite (par le défilement de la vidéo) une conception paysagère qui pourrait s’insérer nul part. Mais ce balcon reste différent, il comprend à travers ses pergolas et ses colonnes une histoire mythique d’HERCULE séparant les deux continents voisins. Nous ne pouvons pas faire abstraction de ce lieu mythique, supprimer toute cette mémoire collective et venir avec des idéologies de minéralisation des places et de palmerisation des petits carrés de surfaces restantes sur nos côtes océaniques.
Ce balcon compose l’histoire de cette ville, comme la Plaza Spania, la rotonda del Cuatro Camino, El Bosque de la Hipica, la tumba de Jean Genet…
Aujourd’hui, il s’agit de notre histoire, de notre ville…
Respectons la mémoire de ce balcon et offrons lui l’histoire qu’il mérite sans la fausser”.